Ton corps est allongé sur le sol maintenant, tes bras sont étendus,
tes pieds sont relâchés,
ce sont tes genoux, ton bassin,
qui articulent tes gestes,
ta marche,
avec l’appui du bassin.
Le dos est toujours en arrière, cambré.
Ta main,
roule devant toi,
tu te tournes,
tu te pousses avec l’aide de ta main droite, replie-toi comme une chenille,
tu es de nouveau sur la tranche de ton corps, sur le matelas qui sent le gymnase du collège, tu respires,
et tu recommences
Il y a des images récoltées de voyages, du théâtre, de la peinture, du cinéma, de rêves, d’expériences vécues, qui sont réappropriées et rejouées sous d’autres formes. C’est un travail qui s’articule autour de la narration et de la mise en scène.
Je raconte des histoires à travers des installations, des vidéos, des textes, des couleurs.
C’est de l’extérieur que les choses se passent.
Le travail de Clara Puleio se préoccupe d’enregistrer l’éphémère, le fugace, saisissant la trace de ce qui reste et perdure, d’une situation, d’un événement, d’un geste, au delà du court instant de la persistance rétinienne, de ce qui s’est produit et qui, depuis, s’est perdu. Elle recueille ou reconstitue, comme autant d’indices, les empreintes laissées sur un support : soit en partant de l’enregistrement direct du mouvement, soit par le moulage à la manière de l’archéologue, soit par la condensation de l’objet, soit par sa reproduction symbolique.
Au delà de la forme, le projet est de retenir au bord de sa disparition, cette impression première que le temps dégrade, en en réactivant au moins la sensation : l’émotion née d’un mouvement ou de la forme d’une pliure qui s’efface, l’ombre qui matérialise le souvenir d’une forme ou d’une présence. […]
Une discussion entre Kevin Desbouis et Valentine Ridde
Kevin Desbouis : Valentine, tes pièces me donnent souvent l’impression d’être dans ce moment d’attente qui précède un concert ou un rendez-vous galant, qu’en dis-tu ?
Valentine Ridde : Je crois qu’au final, c’est un peu dans ce moment-là que tout commence, ça laisse de la place à l’imprévu… et… il se passe toujours une multitude de choses durant ce temps-là. Je dirais que c’est comme un raccourci où le retard devient acceptable. Et il me semble que dans mon travail, ça commence comme ça… je veux dire par là que les rendez-vous deviennent des prétextes pour créer… une sorte d’invitation à partager une histoire dans un temps donné mais dont le spectateur n’aurait qu’une bribe, il y a donc pas vraiment de début, ni de fin.
KD : Aussi, je commets déjà une erreur, car je ne suis pas certain qu’il s’agisse toujours à proprement parler de pièces. J’ai le sentiment qu’une grande partie de ta pratique consiste à déformaliser les choses non ?
VR : Oui, j’ai jamais réellement su ranger les pièces dans leurs boîtes, et « formaliser » les choses me donne la chair de poule… à mon avis, il faut toujours garder une issue sous le tapis ou une sortie de secours…
KD : Il y a quelques années tu portais ce pull à paillettes dans l’obscurité, et lorsque tu craquais des allumettes les paillettes disposées sur le pull se rappelaient à nous. Plus précisément, je crois que cela produisait… cela créait un clignement, comme un courant alternatif. À mon sens, c’était ton feu d’artifice personnel. Ce que je veux dire… ce que tu désires faire de ta vie, un art de la non-célébration, du non-évènement… de l’opportunité manquée… et on revient à l’idée de ne pas faire de pièces au sens strict, échapper à la pièce, et dans ce cas, tout est changé…
KD : Chacune de tes propositions contient en elle-même l’idée d’un délai, ou d’un laps de temps. (J’indique que laps est aussi le mot anglais pour désigner un tour de piste dans un circuit automobile) Ces deux mots constituent à mon sens un véritable enjeu dans ton travail. L’idée même que le temps artificiel de la présentation, de la représentation déborde de son cadre, se passe presque hors du temps… Je n’ai pas vraiment de gêne à te décrire comme une artiste conceptuelle, ou une performeuse qui s’ignore.
VR : Quel tête-à-queue ! Je peux dire que mes joues rosissent…
Oui, la performance est quelque chose vers lequel je tends de plus en plus, et ce vers quoi je veux tendre davantage. C’est amusant parce que je repense à quelques années en arrière… il m‘était incapable de réciter une poésie en public…
KD : On me racontait que Jean Pierre Léaud avait des crampes terribles à la mâchoire, que ça pouvait durer des heures, qu’il y avait des images de ça. Rien sur google… Quelles images vont survivre au fait de ne pas être sur google ? J’ai le sentiment que tu as comme une forme de réticence à l’idée de garder une trace de ce qui advient lorsque tu interviens quelque part, je me trompe ?
VR : C’est drôle que tu parles de ça, parce qu’en ce moment je regarde « OUT 1 » de Rivette, et Jean-Pierre Léaud joue un muet. Et oui, je crois que j’ai un problème avec les images, avec le fait de vouloir à tout prix capturer un moment, garder une trace, et ça va de pire en pire avec les nouvelles technologies, une consommation qui laisse de moins en moins de place à l’expérience. Dans Le Banquet de Platon, il y a Socrate, qui arrive en retard…
« Proposition en un acte », 2017,
Performance, 45 min,
prise de parole, ruban adhésif, citron, billes d’eau, table, machine sous vide, bombe de craie au sol, projection vidéo, édition – « à la mer aux bords des yeux »,
avec Valentine Traverse, Emma Baffet, Jeanne Chopy, Pierre-Olivier Dosquet, Vincent Caroff, Eva Morin, Pauline Lespielle
« À la mer aux bords des yeux »,
édition (scénario) mise sous vide, numérotée et justifiée de 1 à 31, 84 pages
Chair painting 2, 2017, sciure de bois, pigments peinture à l’huile, pastels gras, fil, 250 x 150 cm
CP, 2017, sciure de bois, peinture à l’huile, pastels gras, fils, sur toile sur châssis, 100 x 120 cm
La chaise et sa scie de 120 cm de diamètre
La chaise, 2016, sciure de la chaise sur toile sur châssis, 140 x 140 cm
Prenez place, 20115, papier mâché, sciure de bois, peinture à l’huile, pigments, pastels et crayons gras sur toil sur châssis
The Gate, 2015, papier mâché, pigments, acrylique, pastels et crayons gras sur toile sur châssis, 200 x 120 cm
Les ancêtres, 2017, installation, dimension variable
Eboueur, 2017, poubelle urbaine, béton, crâne en résine acrylique, 130 x 30 x 30 cm environ
Tonton, 2016, vielles poutres de planché, crâne en résine acrylique et pigments, 260 x 35 x 25 cm environ
Where is the original 1, 2017, palettes, coussin, crâne en bronze, 75 x 40 x 60 cm environ
Au moins une fois, on s’est surpris en train de penser qu’on n’est pas venu sur cette terre pour ne faire que ce que nous disent les autres, qu’on n’est pas ici seulement pour payer les factures ou les impôts et qu’on a peut-être une autre raison d’être. Quelque chose qui nous réjouirait, nous égayerait, nous épanouirait… On ne verrait plus passer le temps, on ne saurait plus si on est intelligent ou pas, si on est riche ou pauvre, on ne saurait plus de quelle race on est. Quelque chose qu’on ferrait pour se sentir à sa place, pour se sentir rayonner. Cette chose ou cette place se trouve je ne sais où, mais quelque chose en moi me dit que cette place existe et qu’il faut la trouver. Comment donc la trouver ? Cette place serait-elle un ensemble, une série ou plutôt une succession de petites places ? Ou alors serait-elle comme une devinette introuvable, une énigme ? Une quête incessante, comme un chien qui court après sa queue sans jamais l’attraper. Notre raison d’être serait-elle cet ensemble de places qu’on cherche à occuper tout au long de notre vie, comme on cherche sans cesse la Vérité ? Cette quête permanente de la vérité, de notre place ou de notre raison d’être est également la mienne que je tente de mettre sur ce que j’appellerais une table à palabre publique, sous forme de sculptures, de peintures, de performances… d’objets spécifiques ! La place que je symbolise par une chaise est l’objet qui nous dicte, par le biais de la pensée, la vie que nous menons. La pensée est selon moi, l’élément à travers lequel l’Homme existe mais également l’élément qui empêcherait ce dernier d’exister. Toutes nos actions ne tendent qu’à créer du plaisir, à obtenir ce qu’on veut ou à rejeter les choses indésirables. C’est ce que S. Freud appelait : « principe de plaisir ». Cette pensée de ce qu’on veut qui devient incontrôlable constitue le cœur de mon travail. J’essaie de créer des places, des espaces, des lieux de passages pour les pensées nouvelles, où l’on pourra se reconnecter à la spirale vie, à la loi du changement, où l’on pourra rayonner. Je me sens dans un monde en panne de spiritualité, où l’on passe notre temps à chercher le bonheur à l’extérieur de nous comme s’il s’agissait d’une chaussure bon marché. Gustave Jung disait : « celui qui regarde à l’extérieur rêve et celui qui regarde à l’intérieur est éveillé ».
« Récits posthumes et fragments », 2016, 11 x 18 x 5 cm,
livre passé à la machine à laver et séché
« Syzygie », 2017, vidéo couleur sur 4 écrans synchronisés, 1080p, 15 min,
écrans en bois (192 x 108 cm) montés sur structures métalliques (148 x 148 x 5 cm)
« Syzygie », 2017, vidéo couleur sur 4 écrans synchronisés, 1080p, 15 min,écrans en bois (192 x 108 cm) montés sur structures métalliques (148 x 148 x 5 cm)
« Sans titre (éclosion) », 2017, dimension variable (in-situ). Œuf éclos, caméra endoscopique reliée à un vidéoprojecteur diffusant en direct
« Sans titre (éclosion) », 2017,
dimension variable (in-situ).
Œuf éclos, caméra endoscopique reliée à un vidéoprojecteur diffusant en direct
« Fougeraie nocturne n°1 », 2017,120 x 80 cm,impression sur baryté Canson 310g, contre-collé sur dibond
« Crucés », 2017, vidéo couleur, 1080p, 50 min
« Sans titre (rêve, chouette) », 2016,vidéo couleur, 720p, durée variable (répétition d’un plan de 15 sec entre noirs irréguliers)
Mon travail se nourrit d’un rapport intime avec le paysage non-urbain. Il peut s’exprimer à travers différents médiums, liés à l’image et au récit. Il donne un point de vue sensible du paysage, opérant par un souci d’attention, de ressenti, d’accumulation de matière, et de construction spatio-temporel aussi bien physique que mental. En 2015, j’achevais la construction d’une cabane aux abords d’une forêt, je cristallisais à la fois une position entre le domestique et le sauvage et, en même temps, encrais mon atelier dans un environnement habité par la faune et la flore. Cet encrage m’ouvrit sur une conscience du vivant désanthropocentrée, une connaissance sensible des cycles naturels et donc, à questionner les différentes formes de vie résidentes autour de la cabane.
L’espace urbain et les moyens de déplacement (comme le corps en action et les traces qu’il peut laisser ou qu’il prend par la pratique de cet espace) m’intéressent. La géométrie de la ville, ses différentes utilisations, fonctionnements, sens de circulations et les différentes textures de peau qui la composent sont des détails qui me préoccupent. Toutes ces caractéristiques de l’espace urbain m’aident à réaliser de possibles détournements et modifications que l’on peut faire dans ces espaces.
L’objet, le matériau et l’univers du skateboard et du bmx me permettent d’appréhender l’espace urbain d’une autre façon qui est singulière et personnelle. Un regard affuté sur tout qui m’a permis d’appréhender la ville d’une autre manière.
Tous ces intérêts prennent la forme de volumes, de photographies, de vidéos parfois documentaires et de performances ou d’actions in-situ.
« Allo, j’ai bien reçu ta lettre », canevas, iphone brodé à la brodeuse éléctrique, bracelets en toc, 50cm x 35 cm
« Crotte sur prise »,
dimension variable
« Eve dans Le Banquet de Lilith », performance
« Vacarme dans Le Banquet de Lilith », performance
« David, Adam, le videur », poulpe en latex, machine à fumée
« Le Banquet de Lilith », performance, Bernadette Soubirou
Détail de la performance « Le Banquet de Lilith », pomme, tapis peint, boule de canon volée
« Whitecubi », bois, cubi de vin rouge, verres en plastique, dispositif à activer, 70 cm
« Jésus danse », bois peint, encens en fusion, 45 cm
« Tout commence par un tirage de carte.
Pourvu que le hasard fasse bien les choses, la fête risque d’être bonne.
Sarah Vigier est de ces artistes électriques, éclectiques, de ces femmes qui ont arrêté d’être féministes pour mieux incarner la femme. L’artiste est de ces femmes sulfureuses qui mêlent mysticisme et spontanéité. Nous ne sommes plus à l’époque des chasses aux sorcières. Méfiez-vous messieurs dames, le plumeau de la ménagère est empli de poussière céleste.
Issue du monde théâtral, Sarah Vigier confond le white-cube à la scène. Lorsque la magie opère, le public ne sait plus sur quel pied danser. Ne vous plaignez pas! Bernadette, elle, n’a plus de pieds. Mise en scène ou installations, les objets de Sarah dénotent et détonnent, elles ne regardent plus ses notes, elles les fout en l’air et se laisse aller. Dans un nuage de fumée, ses icônes apparaissent. Lilith rentre en transe, son corps commence à vibrer. Elle est très belle mais il ne faut pas la chercher. Elle se transforme en serpent d’argile, prêt à mordre toute les incarnations d’Eve qui vogueraient proche de l’arbre cosmique. Adam est tétanisé, il est sur son trente et un ce matin mais ne paye pas de mine. Il a petite mine ce matin, il n’a pas l’air très à l’aise. Vous n’êtes pas non plus dans un rêve, Adam bien que tout penaud, protégera toujours sa banane… »
« Monolithe II », 2017,
treillis soudé,
170 x 177 x 90 cm environ
« Monolithe V », 2017,
treillis soudé,
310 x 180 x 160 cm environ
« Monolithe VI », 2017,
treillis soudé,
130 x 320 x 65 cm environ
« Monolithe V », 2017,
treillis soudé,
310 x 180 x 160 cm environ
« Sans Titre (Barrage) », 2016,
photographie, tirage jet d’encre sur contreplaqué,
320 x 470 mm
« Sans titre (Paysage) », 2017,
pigments et liant acrylique sur bâche,
300 x 400 cm
« Série Tunisie », 2016-2017,
cinq toiles, tempéra sur toile, 81 x 100 cm
« Monolithe II », 2017
treillis soudé, 170 x 177 x 90 cm environ
« Monolithe III », 2017
treillis soudé, 110 x 210 x 80 cm environ
Salomé Aurat s’intéresse à la question du paysage, prenant sa mesure et valsant avec lui au sein d’une production plastique variée. Œuvres in situ et éphémères, tout semble se soumettre à une tentative de rapprochement de l’environnement immédiat, cadre, contenu et vecteur de sa démarche, donnant forme à des retranscriptions d’ordre documentaire de sa pratique sur « des lieux spécifiques » jusqu’à une transpositions de ses formes, ses images prélevées, dans l’espace d’exposition.
La question d’intégrer le geste artistique dans le paysage sauvage de façon éphémère et subtile est primordiale dans le travail de Salomé Aurat, travailler avec, et pas seulement dans le paysage semble être le mot d’ordre. Le geste ne fait pas que s’intégrer dans le paysage, il en épouse les formes, caresse les aspérités, se laisse porter par ses flux. Il n’est plus question de seulement viser le paysage, mais d’en faire partie.